Dans la coquille vide de l’œil

Dans la coquille vide de l’œil

Texte et dessins

Max de Larminat

Texte et dessin

Max de Larminat

Dans l’aquarium de la nuit, il jette au loin ses doigts comme un filet, mais il n’en remonte nulle image. Ses poissons-pilotes s’évertuent sans plus de succès à lui apporter tout un frai d’yeux stériles dans leur bouche. Quoi qu’il fasse, l’écart se creuse entre son double et lui. Au diable ce miroir de si peu de mémoire.

Dans l’aquarium de la nuit il jette au loin ses doigts comme un filet mais il n’en remonte nulle image. Ses poissons-pilotes s’évertuent sans plus de succès à lui apporter tout un frai d’yeux stériles dans leur bouche. Quoi qu’il fasse, l’écart se creuse entre son double et lui. Au diable ce miroir de si peu de mémoire.

Faute de mieux, il braque sa main vers son visage et retourne son œil contre lui-même comme une lanterne sourde. En vain. Il ne connaît que trop bien, hélas, l’inconsistance de ses lunes intimes. Sous ses doigts ombrageux s’effondrent les cendres de toutes images.

Faute de mieux, il braque sa main vers son visage et retourne son œil contre lui-même comme une lanterne sourde. En vain. Il ne connaît que trop bien, hélas, l’inconsistance de ses lunes intimes. Sous ses doigts ombrageux s’effondrent les cendres de toutes images.

Il fouille inlassablement pourtant les décombres d’obscures géométries perdues, espérant trouver une verticale obstinée encore debout laissée par un essor d’oiseaux ; ou le vestige de quelque impérative horizontale abandonnée par une migration  de poissons ; voire quelque ligne de fuite encore rectiligne couchée de tout son long sous un linceul de poussière. 

Il fouille inlassablement pourtant les décombres d’obscurs géométries perdues, espérant trouver une verticale obstinée encore debout laissée par un essor d’oiseaux ; ou le vestige de quelque impérative horizontale abandonnée par une migration de poissons ; voire quelque ligne de fuite encore rectiligne couchée de tout son long sous un linceul de poussière.

Pourtant, rien n’y fait. C’est à peine si d’incertains battements d’ailes roulent encore sa tête close comme un galet dans la glu des étoffes ; ou si de vagues simulacres de poissons sans nageoires et sans yeux consentent à se lover paresseusement sous ses paupières sans perspective.

Pourtant, rien n’y fait. C’est à peine si d’incertains battements d’ailes roulent encore sa tête close comme un galet dans la glu des étoffes ; ou si de vagues simulacres de poissons sans nageoires et sans yeux consentent à se lover paresseusement sous ses paupières sans perspective.

Son œil sans mémoire n’est depuis longtemps qu’une coquille bourrée de chiffons, qu’en désespoir de cause, il brise en travers du seuil, n’espérant plus vraiment qu’à la croisée du dehors et du dedans puisse enfin se dénouer l’indénouable.

Son œil sans mémoire n’est depuis longtemps qu’une coquille bourrée de chiffons, qu’en désespoir de cause, il brise en travers du seuil, n’espérant plus vraiment qu’à la croisée du dehors et du dedans, puisse enfin se dénouer l’indénouable.

Mais voilà qu’insensiblement poussé par l’haleine glacée de la nuit qui, contre toute attente, entrouvre les rideaux, il s’aventure dans les salles ouvertes à tout vent du désert. Il gouverne à tâtons vers le nord, cherchant dans les sables d’un sommeil purgé de ses mirages ardents une improbable semence d’Étoile Polaire propre à engrosser son œil.

Mais voilà qu’insensiblement poussé par l’haleine glacée de la nuit qui, contre toute attente, entrouvre les rideaux, il s’aventure dans les salles ouvertes à tout vent du désert. Il gouverne à tâtons vers le nord, cherchant dans les sables d’un sommeil purgé de ses mirages ardents une improbable semence d’Étoile Polaire propre à engrosser mon œil.

C’est alors qu’un éclat de quartz fond soudain sur son œil comme un flocon de neige. Son rêve boréal soulève une tempête d’images comme au temps où la mer léchait encore ses yeux. Son poisson-pilote remontant enfin du passé lui offre à pleine bouche cette moisson de paysages qui ne demandaient qu’à éclore.

C’est alors qu’un éclat de quartz fond soudain sur son œil comme un flocon de neige. Son rêve boréal soulève une tempête d’images comme au temps où la mer léchait encore ses yeux. Son poisson-pilote remontant enfin du passé lui offre à pleine bouche cette moisson de paysages qui ne demandaient qu’à éclore.